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Par Doreen Valiente. Extrait du livre : « An ABC of Witchcraft ». Traduction & adaptation : Lune.
Feu Elliott O’Donnell, auteur de nombreux recueils d’histoires de fantômes, a également écrit un livre fascinant dont le titre est « Strange Cults and Secret Societies of Modern London » (Philip Allan, London, 1934). Dans ce livre, O’Donnell donne des détails très curieux sur ce qu’il appelle le culte des arbres. Il rapporte que certaines personnes, généralement dont les ancêtres ont un lien avec les Celtes, se découvrent une parenté particulière avec les arbres et ont des croyances remarquables à leur sujet.
Ce culte des arbres existe toujours et a beaucoup en commun avec l’Art des Sages (ndlt : la sorcellerie). (Ce culte des arbres n’est pas appelé ainsi par ceux qui le pratiquent, mais pour nous il est plus pratique de suivre l’exemple d’O’Donnell.)
Ces croyances concernant les arbres, leurs propriétés magiques et les esprits qui, croit-on, résident en eux, sont aussi anciennes et répandues qu’il est impossible de faire plus ici que donner un aperçu de la tradition des arbres et ses liens avec la sorcellerie.
Les arbres ont non seulement des personnalités distinctes, pour ceux qui sont sensibles à de telles choses, mais nombre d’entre eux sont aussi la demeure des esprits qui peuvent être amicaux envers les humains ou, parfois, tout au contraire. Elliott O’Donnell utilisait un terme curieux pour décrire ces arbres hantés par les esprits, que je n’ai jamais vu ailleurs que dans ses livres : » stichimonieux » (ndlt : stichimonious dans le texte. De « stichios« . En Grèce moderne, certains arbres possèdent leur stichios, une créature décrite comme un spectre, une âme errante, un fantôme flou, parfois invisible, qui prend à d’autres moments les formes les plus variées. Lorsqu’un arbre est « stichimonieux », il est dangereux pour l’homme. O’Donnell reprend ce terme du livre du Baron d’Estournelles : « Superstitions of Modern Greece »). Il fit la découverte de tant d’histoires sur les arbres de nature étrange ou fantomatique qu’il écrivit plus tard un recueil intitulé « Trees of Ghostly Dread » (Riders, London, 1958).
Tuck’s Wood près de Buxted est un bois hanté du Sussex qui est tout particulièrement lié au fantôme d’une sorcière. L’histoire de cette hantise remonte à de nombreuses années et concerne celle d’une belle jeune fille nommée Nan Tuck qui acquit, d’une façon ou d’une autre, la réputation d’être une sorcière. Un jour, une foule en colère s’en prit à elle et la menaça de la « faire flotter » dans l’étang de Tickerage Mill. Elle prit la fuite, la foule à sa poursuite et se rendit à l’église de Buxted pour demander refuge. Elle parvint à atteindre « l’anneau du droit d’asil » (le grand anneau de fer sur la porte de nombreuses églises anciennes). Mais le curé la repoussa en citant le texte qui dit : « La sorcière, tu ne la laisseras point vivre » et elle fut vraisemblablement abandonnée à la foule.
Par la suite, elle se pendit à un arbre de Tuck’s Wood et depuis son fantôme hante le bois et ses environs. Son lieu de sépulture est marqué par une ancienne dalle funéraire à l’extérieur du mur du cimetière, près du porche de celui-ci.
L’existence de si nombreuses histoires de fantômes liées à la forêt et aux arbres en général n’est pas si difficile à expliquer, lorsque l’on réalise qu’une créature vivante aussi ancienne et forte qu’un arbre doit posséder une aura (ou champ de force) puissante. Certaines personnes sensibles peuvent voir l’aura des arbres, semblable à une faible lueur argentée contre le fond du ciel. En appuyant leur dos contre un arbre, elles peuvent se relier à sa vitalité, puisée profondément dans la terre et nourrie par la lumière du soleil et de la pluie. De nombreux arbres ont une influence de guérison sur les humains, lorsque leur force vitale est ainsi placée à leur contact.
Les arbres sont les plus anciens êtres vivants au monde : les anciens séquoias de Californie, dont on estime l’âge à environ 4000 ans, continuent de produire des bourgeons et des feuilles. L’un des plus grands morceaux de musique au monde, « Largo » de Haendel, est une mélodie qui loue la beauté d’un arbre. Un arbre est bien plus que du bois et des feuilles.
Un arbre remarquable sert souvent de lieu de rendez-vous à de nombreuses fins, notamment dans le contexte de la Vieille Religion. Avec leurs étranges formes noueuses, les aubépines solitaires suggèrent, d’une manière ou d’une autre, la sorcellerie et le royaume des fées. C’est le cas de cet arbre fantastique que l’on appelle the Witch of Hethel (la Sorcière d’Hethel).
Cette très vieille aubépine se situe dans le village d’Hethel, au sud-ouest de Norwich, dans le comté du Norfolk. Quel âge a-t-elle ? Nul ne le sait. Le précédent propriétaire de cette terre, Sir Thomas Beavor premier du nom, aurait possédé un acte de propriété datant du XIIIe siècle et mentionnant cet arbre sous le nom de « the old thorn » (ndlt : la vieille aubépine). Une autre bribe de tradition affirme que l’arbre était un lieu de rencontre pour les paysans mécontents, lorsqu’ils organisèrent une révolte sous le règne troublé du Roi John (1199–1216).
Aujourd’hui, le tronc de l’aubépine est fendu et ses branches noueuses se sont étalées pour former comme une petite forêt miniature chacune. En de nombreux endroits, elles sont soutenues par des étais. Mais en dépit de son âge incroyable, la Sorcière d’Hethel continue à produire quelques grappes de fleurs parfumées chaque mois de mai. Heureusement, cet arbre historique est aujourd’hui entretenu par le Norfolk Naturalists’ Trust.
Mais pourquoi l’appelle-t-on la Sorcière d’Hethel ? Personne ne semble le savoir exactement. Il y a un indice intéressant : l’arbre se situe près de l’église du village et si celle-ci est ancienne, l’aubépine serait encore plus vieille. Nous savons que les anciennes églises étaient souvent construites sur des sites sacrés païens. Ainsi, cette église peut avoir été construite délibérément près d’un arbre sacré. La sorcière d’Hethel était peut-être autrefois la déesse d’Hethel, incarnée sous la forme de son arbre sacré.
L’aubépine était jadis un arbre sacré comme en témoigne le fait qu’il était considéré comme malchanceux de faire entrer ses fleurs dans une maison. La veille du mois de mai était le seul moment où il était permis de rompre des branches de l’arbre de la Déesse Blanche, lorsqu’elles étaient employées pour les célébrations du 1er mai. Il existe de nombreux récits populaires à propos de personnes qui ont été blessées ou à qui il est arrivé malheur en coupant ou en déracinant quelque vieille et vénérable aubépine.
Le chêne, le frêne et l’aubépine forment la Triade Féerique et là où ils poussent ensemble, vous pouvez vous attendre à ce que les fées hantent le lieu. Dans la New Forest, il existe une comptine populaire :
Turn your cloaks,
For fairy folks
Are in old oaks.Vos capes, retournez
Car les fées
Sont dans les chênes ainés.
Porter son manteau à l’envers constituait un remède contre l’ensorcellement provoqué par les lutins ou le glamour des fées (ndlt : glamour signifie ici fascination, magie) et destiné à vous égarer, à vous faire perdre votre chemin.
Le chêne est l’ancien arbre britannique de la magie, révéré des druides. C’est l’un des arbres les plus puissants, à la plus grande longévité et dont le potentiel est pourtant contenu dans le plus petit des glands. C’est l’origine probable de l’ancienne croyance selon laquelle porter un gland dans son sac à main ou sa poche permettrait de conserver santé, vitalité et jeunesse.
De plus, le gland dans son calice possède une forme phallique et c’est donc un emblème de vie et de chance. C’est pour cette raison qu’autrefois, à l’entrée des maisons, les montants des piliers du portail étaient souvent sculptés en forme de gland.
C’est également la raison pour laquelle les stores vénitiens de style ancien possèdent souvent au bout de leurs cordons un gland en bois sculpté. À l’origine, un gland était suspendu à la fenêtre pour porter chance et éloigner les mauvaises influences. Son véritable sens tend à être progressivement oublié, mais la coutume de décorer les stores avec des motifs de gland demeure.
Il a été suggéré que les termes absurdes « Hob a derry down-O », qui apparaissent dans certaines chansons folkloriques, sont en réalité des bribes d’une ancienne phrase corrompue en celtique qui signifie « dansez autour du chêne ». Derw est le terme vieil anglais pour chêne et il semble assez certain que Derwydd, littéralement « voyant-du-chêne », est le terme originel pour « Druide ». Les sorcières d’aujourd’hui dansent parfois autour d’un chêne ou d’une aubépine, puis versent une libation de vin rouge sur leurs racines. L’arbre est un emblème du pouvoir de la vie et de la fertilité, qu’elles vénèrent par cet acte.
Des fragments du savoir traditionnel à propos des arbres témoignent souvent de leur antique importance dans la religion païenne. Par exemple, il y a un curieux passage dans le livre de John Evelyn, « Sylva, or a Discourse of Forest Trees » (London, 1664). Il nous dit à propos d’un certain chêne très ancien et vénérable de Staffordshire :
Sur le serment d’un bâtard engendré à l’ombre de ses branches (dont la portée est très grande du lever au déclin du soleil, je peux vous l’assurer), le crime n’était pas exposé à la censure ni du magistrat ecclésiastique ni du magistrat civil. »
Ceci rappelle certainement les rites de fertilité des temps anciens, sous le chêne sacré. La même vieille coutume se retrouve cachée dans un certain nom de lieu du Sussex, Wappingthorn Wood, juste au nord de Steyning. « Wap » ou « wape » est un terme ancien qui signifie « avoir des rapports sexuels », dans ce cas sous l’aubépine sacrée.
Le sureau est un arbre de réputation plutôt sinistre et particulièrement associé à la sorcellerie. Nul campagnard d’autrefois n’aurait brûlé de bûches de sureau dans sa cheminée, parce que ce faisant le Diable serait entré dans la maison. Les baies de sureau donnent un vin puissant et ses fleurs blanches fortement parfumées sont appréciées des herboristes. Le mélange de fleurs de sureau et de menthe poivrée constitue un remède contre les rhumes et refroidissements. Toutefois, le lourd parfum des fleurs de sureau dans l’air chaud de l’été a quelque chose de dérangeant. Arthur Machen l’a décrit par cette phrase évocatrice : « une vapeur d’encens et de corruption ». Certains le considèrent comme nocif, d’autres comme aphrodisiaque.
Le sureau est notoirement un lieu de résidence des esprits, à tel point qu’une ancienne croyance nous dit que nous ne devrions jamais couper ni casser de partie d’un sureau, sans en demander la permission à toute présence invisible. Un sureau qui pousse dans un vieux cimetière est particulièrement puissant à des fins magiques. Par exemple, il peut être utilisé pour charmer les verrues, il faut que vous coupiez un petit bâton de son bois vert lors de la lune décroissante, que vous frottiez les verrues avec ce bâtonnet de sureau et que vous l’enterriez ensuite quelque part où il ne sera pas dérangé et pourrira. Au fur et à mesure que le bâtonnet se désintégrera, les verrues disparaîtront.
Certains croyaient que le sureau constituait une protection contre la sorcellerie, peut-être parce qu’on pensait que son bois avait servi à fabriquer la Croix et qu’il s’agissait de l’arbre auquel se pendit Judas. D’autres considéraient les buissons de sureau avec suspicion, surtout s’ils en rencontraient un à la tombée de la nuit, là où ils ne se souvenaient pas en avoir vu auparavant. Il pouvait s’agir d’une sorcière déguisée, transformée par un charme magique en sureau. De vieilles histoires racontent que les sorcières en étaient capables. Il existe tant de légendes à propos du sureau que son association à la magie et à la sorcellerie est presque certainement préchrétienne.
Un curieux incident survenu en 1966 dans le Sussex témoigne de la persistance d’un culte aux croyances magiques lié aux arbres. En mars de cette année-là, le Brighton Evening Argus a rapporté qu’une malédiction avait été publiquement jetée sur quiconque abattrait un vieil orme près de Steyning, dans le Sussex. L’arbre était menacé de destruction pour faire place au développement des habitations et l’avis que l’on trouva épinglé à l’arbre disait :
Hear ye, hear ye, that any fool,
Who upon this tree shall lay a tool,
Will have upon him a curse laid,
Until for that sin he has paid.Oyez, Oyez, tout insensé
Qui, sur cet arbre, posera sa cognée,
Par malédiction, sera envoûté,
Jusqu’à qu’il ait payé ce péché.
Cet avis était décoré de symboles magiques. La police enquêta sur l’affaire, mais pour autant que je sache, l’auteur de cette mystérieuse menace n’a jamais été découvert.
L’expression « toucher du bois » est une relique de l’ancien culte des arbres. (Une fois, un homme m’a dit, avec le plus grand des sérieux : « Je ne crois pas aux superstitions et je ne toucherai jamais du bois ! ») Les concepts de l’Arbre-Monde et de l’Arbre de Vie se répètent, encore et encore, dans la mythologie et le symbolisme païens. Notre arbre de Noël, avec ses babioles scintillantes et son étoile au sommet, est une version miniature de l’Arbre-Monde de nos ancêtres païens. Les racines s’enfoncent profondément dans la terre. Le soleil, la lune et les étoiles sont suspendus à ses branches étalées. Et l’étoile Polaire est placée à sa cime. Parfois l’étoile est remplacée par une figurine de fée, représentant la déesse de la nature qui règne sur le monde.
La présence d’excroissances sur un arbre, que les gens de la campagne appellent « balais de sorcières« , est le signe qu’il est le foyer d’influences mystérieuses. Son apparition est en réalité causée par une sorte de champignon, qui a pour effet de stimuler la pousse de certaines branches de l’arbre en d’anormaux bouquets épais, denses et touffus, ressemblants à des balais. Le groupe de branches en forme de balais a également tendance à feuiller avant le reste de l’arbre. Dans l’ancienne tradition des campagnes, un arbre qui portait le signe du balai des sorcières était assurément considéré comme recelant quelque chose d’étrange et de magique.