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La Sombre Déesse
Par Gaïa © (du site Bouddica), Traduction/adaptation Lune
Les qualités essentielles de la lune noire sont le changement et la transformation. Aujourd’hui, nous sommes nombreux à redouter les enseignements de cette sombre lune (et sombre Déesse) que sont l’Alchimie, l’astrologie et autres disciplines spirituelles ou liées à la psychologie. Ceux-ci nous révèlent énormément sur notre inconscient et sur les dimensions subtiles de l’être.
La Bible nous dit que cela est mal et contraire à la volonté de Dieu. Les enseignants nous expliquent que les chercheurs scientifiques et praticiens ne peuvent les valider et les classifient comme étant du « charlatanisme ». Cependant, ces enseignements, basés sur le rythme du modèle cyclique, nous apportent une conduite, un savoir et nous permettent de passer par les dimensions sombres et non-physique de l’être (de la mort à la renaissance, de la fin au renouveau ou à la guérison spontanée) avec clarté et confiance plutôt qu’avec panique ou peur. Les traditions philosophiques nous ont répété maintes fois que les petites réponses définitives aux questions existentielles sont véritablement trouvées, non pas dans le monde extérieur, mais profondément en soi, dans les replis obscurs de notre esprit (Demetra George in Mysteries of the Dark Moon, p 51-22).
Au sein de la psychologie de l’humanité, il s’est produit une polarisation entre les Dieux mâles qui vinrent « d’au-dessus », les porteurs de lumière (les dieux lumineux et solaires des envahisseurs nomades –Aryens, Kurgans, Sémites et Doriens- issus des steppes du Nord de l’Europe, où le « grand ciel » régnait sur le froid et les terres interdites) et les divinités féminines qui continuèrent à être « l’obscurité » (fertile) de la Terre et de ses grottes. La lumière était associée au bien et l’obscurité au mal.
Alors que la Déesse s’éloignait de l’image de la mère compatissante, source et dispensatrice de toute vie… pour devenir un symbole associé aux forces des ténèbres et du mal… les femmes, c’est-à-dire Sa manifestation terrestre, furent assimilées de la même manière. Elles devinrent impures, mauvaises et coupables du pêché originel. Elles devaient être punies. Les femmes qui avaient des relations sexuelles hors mariage (monogame et patriarcal) étaient une menace pour la filiation (par le sang) patriarcale. Elles étaient alors bannies de la société ou tuées. Leurs enfants illégitimes étaient privés de tout droits légaux et sociaux (George, 38).
La « mort » de la Déesse et l’apparition des Dieux peuvent être compris en terme de changements. Ces changements étaient en train de se produire dans le cerveau humain durant cette période de transition. Julian Jaynes, Professeur à l’université de Princeton, suggère, dans son étude controversée sur la conscience humaine, que les gens des temps anciens ne pensaient pas de la même façon que nous aujourd’hui. Ces personnes étaient « bicamérales ». Elles étaient dirigées par des voix émanant du côté droit de leur cerveau alors que le côté gauche les appréhendait. Ces voix étaient considéraient comme divines. Les anciens y obéissaient sans plus de questions jusqu’à ce qu’une série de désastres naturels survienne et que la complexité grandissante de leur société les force à devenir (ce que nous aimons appeler) conscients (autour de 1500 avant JC).
La cosmologie qui s’était développée durant le règne de la Déesse, éveillée par les sortes de processus de pensée, trouvait son origine primaire en dehors du cerveau droit. Le cerveau droit est féminin en polarité, circulaire en mouvement, de nature intuitive, auditive en perception. Le cerveau droit est lié au relationnel et à « l’unifiant ». Il se focalise sur une vision holistique des choses similaires et inter-reliées… Il perçoit le temps comme cyclique. L’humanité honorait alors une déité féminine et lunaire qui tournait et se renouvelait sans cesse. Elle a éclairé le mystère où la fin et le commencement sont un même point. Les gens percevaient la mort et le sexe comme un moyen de renaissance. Ils n’étaient effrayés ni par l’obscurité de la mort, ni par l’extase dans la sexualité, ni, non plus, par les Déesses et leurs prêtresses qui facilitaient leurs transition entre les vies.
Jaynes ne discute pas la substitution des Dieux Mâles aux Déesses. Il se documente néanmoins sur les catastrophes et cataclysmes qui commencèrent à se produire au milieu du second millénaire avant JC. En plus des éruptions volcaniques, raz de marrée, inondations massives, il voit l’étendue des guerres et la dislocation, identifiée précédemment, comme le fait des invasions patriarcales. Jaynes suggère que l’esprit rationnel, logique et analytique est une des fonctions du cerveau gauche, qui était développée pour assister l’humanité à travers la complexité croissante du monde en mouvement. Il en conclut que les fonctions du cerveau gauche devenaient plus actives en ce temps et influençaient la perception des individus sur la réalité.
Le cerveau gauche est masculin en polarité, linéaire en mouvement, par nature logique, et visuel en perception. Ce sont des valeurs prédominantes en ces temps modernes d’intellectualisme analytique, technologique et scientifique. Tandis que le cerveau droit se focalise sur la ressemblance des choses, le cerveau gauche accentue leurs différences ! Cela développe nos capacités d’analyse et de discernement, ainsi que dans le processus de perception qui permet d’établir une distinction entre le sujet et l’objet. Cette vision dualiste démontre une séparation entre le soi et les autres, entre nous et eux, et cette perception inévitable nous dirige vers une guerre des opposés qui produit un oppresseur et sa victime… Après 1500 av. JC, lorsque les êtres humains eurent commencé à fonctionner avec leur cerveau gauche, associé donc au principe masculin, ils firent la distinction entre eux-mêmes et le reste de la création. Dès lors, ils furent effrayés par la menace d’être écrasés par les forces extérieures (puisque séparées d’eux-mêmes). Ils furent excités par le désir de conquérir le principe féminin, incarné par la Déesse, les femmes et la Nature, plutôt que de vivre en harmonie avec celui-ci (George, pp 40-44).
« Tandis que la religion de la Déesse incluait toujours un concept de monde souterrain, où la notion de punition ne tenait aucune place, et où il était simplement question d’une brèche entre les vies : le sombre utérus de la Déesse, où chacun serait purifié, soigné et préparé à la renaissance. Les religions monothéistes et patriarcales fonctionnaient en dehors du principe du ‘cerveau gauche’, ce qui engendra la création d’un paradis et d’un enfer y associant la notion de bien et de mal, la récompense et la punition. Et cet enfer du Dieu-Père irascible était rempli de tortures sadiques éternelles et d’atroces souffrances. L’humanité commença alors à avoir peur de l’obscurité de la mort. Ceux qui, durant leur vie, n’étaient pas sauvés par une conversion religieuse à ce Dieu, faisaient face à une mort synonyme d’éternelles tortures et de finalité absolue. Leur terreur s’étendit à la Sombre Déesse de la Sombre Lune, qui restait désormais celle qui apporte la mort et non plus le renouvellement. Lorsque la Déesse fut séparée de son rôle cyclique de renouveau, ses 3 sombres aspects devinrent l’image terrifiante de démons féminins qui séduisaient, dévoraient et mettaient fin aux vies humaines. On a alors haï le sombre aspect de la Déesse, on L’a persécutée, effacée et rejetée par delà l’aube de l’Histoire, dans les profondeurs de l’inconscient…
Aujourd’hui, la Sombre Déesse, telle la triple Déesse ancienne, représente les différents aspects rejetés de la trinité de l’intégrité féminine. Les enseignements de la Déesse de la Lune Noire sont liés à la divination, à la magie, à la guérison, à la sexualité sacrée, à la dimension non-physique de l’être, aux mystères de la naissance, de la mort et de la renaissance. Désormais appelées pseudo-sciences, celles-ci n’ont pas été validées en tant qu’espaces de recherches légitimes par les institutions religieuses et éducatives modernes.
L’ombre, selon la psychologie « Jungienne », est le noir, la part rejetée de notre psyché. Influencés par les valeurs de notre culture, nous ne percevons pas ces qualités. Il n’est pas souhaitable ou acceptable d’exprimer cet aspect de notre personnalité. L’ombre recèle ce que nous n’aimons pas de nous-mêmes et que nous trouvons menaçant, honteux et inadéquat. Nous ne les appréhendons pas comme des valeurs estimables et positives. Nous nous empressons alors de les étouffer et de les nier.
La nature inhérente de la Sombre Déesse des origines, celle qui apporte à la fois la mort et la renaissance, a été réprimée et reniée durant des milliers d’années. Dès lors, cette pernicieuse image a déformé et corrompu notre perception de l’aspect intrinsèque de la nature féminine. La sombre Déesse fut conceptualisée maléfique et ses enseignements sur l’obscurité, le sexe et la mort furent déformés. Notre littérature concernant les mythes abonde d’images de cette ténébreuse Déesse, la représentant comme un démon féminin. Elle effrayait telles les Parques, qui, à notre naissance, déterminaient le moment de notre mort… Telle Némésis la Déesse du jugement et de la mort rapide ; telles les Furies, qui pourchassaient un homme jusqu’à la folie et la mort ; Médée, qui tuait ses enfants ; Circée, qui transformait les hommes en porcs ; Médusa qui les changeait en pierre ; la Lamie qui suçait leur sang ; Lilith qui les séduisait dans le but de procréer des démons et Hécate, Reine des Sorcières, qui enlevait les hommes dans le monde souterrain (ibid, 43-44). Dans la culture populaire, il n’y a pas de meilleure représentation de la Déesse Sombre que l’Alien-mère combattant Sigourney Weaver. Notre peur, notre rage et notre dégoût de la Noire Déesse peut être perçue à travers nos réactions sévères face aux femmes qui ne se conduisent pas en mères aimantes et attentionnées. En somme, lorsqu’elles n’agissent pas comme on voudrait qu’elles le fassent.
Demandez à quelqu’un de donner une description du type de personnalité qu’il trouve la plupart du temps agressive, irritante et avec laquelle il est impossible de bien s’entendre. Il décrira à coup sûr sa propre part d’ombre réprimée !
La psychologie Jungienne nous dit qu’afin de guérir les blessures et atténuer les souffrances causées par le rejet des aspects de notre moi complet, entier, nous devons tout d’abord entrer dans notre inconscient et développer une relation avec notre « ombre ». Nécessité pour reconnaître toutes ces parts haies et occultées par nous-mêmes. Car celles-ci ont un besoin légitime d’exister et d’être exprimées. Si nous pouvons affirmer tous les aspects de notre nature humaine, reconnaissant à la fois les qualités attrayantes et celles qui le sont un peu moins, dès lors nous aurons l’option pour transformer les énergies les plus « problématiques » en activité constructive et bénéfique dans nos vies et relations…
Nous avons besoin d’aller dans nos ténèbres et de faire la paix avec toutes les parts perdues de nous-mêmes, afin de retrouver la guérison et le renouveau qui résident dans l’obscurité.
Le voyage du héros ou de l’héroïne dans le monde souterrain qui récupère les trésors volés par le monstre n’est pas une quête facile. C’est une quête pleine de dangers… De la même façon que nous nous dirigeons vers l’acceptation de l’intégralité de notre être, nous aurons inévitablement à dompter notre peur du noir…
Et alors nous devons invoquer et louer notre Sombre Déesse, qui fut reléguée dans les replis de notre psyché. Sa fonction ultime est de faciliter la transformation qui survient dans l’obscurité. Elle provoque la mort de notre ego, de nos anciennes formes et de nos suppositions erronées afin que nous puissions donner naissance au renouveau… Nos expériences personnelles de guérison, dès lors, deviennent le terrain d’apprentissage pour la compassion. C’est ce qui permet l’accès à nos capacités insoupçonnées (tel le guérisseur blessé). Le mystère de la Lune Noire réside dans la mort et la naissance qui sont les deux visages jumeaux de son orgasme cosmique avec le Dieu Soleil, chaque mois à la nouvelle (conjonction de la) lune. Cet orgasme accompli dans l’amour, Elle poursuit sa révolution, tournant toujours autour de la Terre. Elle envoie une pluie de bénédictions tout en sachant qu’il n’y a point de néant. (ibid. 55-58).