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Kotodama et Jumon. Par James Deacon ©, traduction Artus
Aujourd’hui, certaines personnes affirment que Usui Sensei enseignait la pratique de kotodama (une discipline issue de la religion shinto) aux étudiants de niveau II (okuden) – ceci inclut le fait de psalmodier des sons sacrés (à la fois des syllabes et des sons de voyelles).
Le terme : kotodama lui-même se traduit de manière simpliste par « mot esprit » et fait référence a un état spirituel ou un ressenti, induit par la beauté de « mots-sons » quand ils sont correctement psalmodiés. (De manière plus complète, le kotodama englobe la notion que le bien peut être provoqué par de beaux « mots-sons » correctement psalmodiés et que le mal peut être provoqué par de vilains « mots-sons » – ou par de beaux « mots-sons » prononcés incorrectement.)
Le kotodama est connecté de façon inséparable avec le concept de kotomuke (« les paroles reposantes qui amènent la paix ») et de kotohe (la pratique qui consiste à parler fort en présence des kami (êtres divins), cherchant à invoquer les pouvoirs magiques des mots).
Alors que le kotodama est essentiellement une pratique dérivée du shinto, le bouddhisme japonais mikkyo a sa propre pratique équivalente connue sous le nom de jumon ou de shingon.
En essence, le kotodama et le jumon/shingon sont centrés autour des concepts du pouvoir sacré du langage et de l’intention, de l’usage rituel de la vocalisation/incantation – dans les deux cas comme un moyen d’approche du divin et pour manifester des effets désirés au niveau d’une réalité plus mondaine.
Bien que, historiquement originaire des royaumes du shinto, la pratique et théorie du kotodama moderne a été influencée et modelée, à un certain niveau, par la théorie et pratique du jumon/shingon de mikkyo.
La non-exclusivité a depuis longtemps été une caractéristique typique de la religion japonaise, avec le shinto et le bouddhisme qui empruntent facilement des idées philosophiques et des pratiques rituelles de l’un à l’autre. C’est quelque chose qui s’est perpétré depuis le VIIIème siècle de notre ère et l’apparition de la doctrine syncrétique connue sous le nom de « ryobu shinto ». Aussi connue sous le nom de « honji suijaku », cette doctrine assimile les divinités bouddhistes (c’est-à-dire, les bouddhas et bodhisattvas) aux kami du shinto, ce qui conduisit, au cours du temps, à augmenter les niveaux de chevauchement, de mélange et de synthèse, entre les idées et pratiques du bouddhisme et du shinto, à un point où il est souvent impossible de dire quelles pratiques ou idées philosophiques appartiennent vraiment à quel culte.
Jumon
La pratique dérivée du bouddhisme du nom de jumon ou shingon (l’équivalent au mot mantra en sanskrit) est communément utilisée en conjonction avec nenriki (la visualisation de symboles, mandalas, etc.) et ketsu-in – aussi connu sous le nom de in-zou ou shu-in – (des mudras – des gestes rituels spéciaux réalisés en nouant les doigts de façon variée et complexe) – ces trois éléments mis ensemble constituent une discipline synergique, d’une portée d’application pratique et mystique, plus large et plus profonde que la pratique du kotodame issue du shinto.
D’un point de vue mikkyo, le praticien reiki qui psalmodie/répète CKR, SHK, HSZSN, DKM, (que ça soit silencieusement ou à voix haute), en méditation ou lors de traitements reiki, est un exemple typique de jumon en action. Les shirushi (symboles) reiki eux-mêmes peuvent d’une certaine manière être considérés comme des nenriki, et les gestes spécifiques ou positions de doigts enseignés par Usui Sensei peuvent être considérés comme des ketsu-in.
La triple discipline de jumon, nenriki, et ketsu-in est généralement nommée sammitsu (ou : san-himitsu), ce qui signifie « les trois secrets » ou « les trois mystères », et c’est par l’étude et la pratique de cette discipline que les adhérents du courant principal du bouddhisme mikkyo cherchent à éveiller une expérience directe d’illumination.
Cependant, dans les mains de praticiens plus avant-gardistes de mikkyo – divers groupes comme senin, gyoja, et shugenja/guerriers ascétiques de la montagne Yamabushi, la discipline de sammitsu est devenue non seulement un chemin vers l’illumination, mais aussi un moyen de développer, concentrer et augmenter les capacités « spéciales » – de l’augmentation de la coordination physique, au contrôle de la douleur, aux pouvoirs d’exorcisme et de guérison, à l’augmentation de la sensibilité intuitive et psychique, à l’induction d’états visionnaires proches du chamanisme.
Il est probable que la plus célébrée conséquence de sammitsu est le kuji-in (ou kuji-no-in), qui implique le fukushu (répétition) du jumon sacré de neuf mots « rin-pyo-to-sha-kai-jin-retsu-zai-zen » combiné avec l’exécution des neuf ketsu-in d’accompagnement et la visualisation de nenriki appropriés.
Quand il est pratiqué avec les bonnes durées de respiration et le bon état méditatif, le kuji-in est considéré comme une technique très puissante et a traditionnellement été utilisée par les mystiques, les guerriers, les prêtres, les guérisseurs, et de même les chamanes ; en fait, cela fait partie du cœur de la pratique japonaise mystique, magique et chamanique.
Le kotodama de Ueshiba
L’un des instigateurs modernes les plus célèbres de l’art du kotodama était Morihei Ueshiba – fondateur de l’art martial spirituel, l’Aïkido.
Ueshiba, qui durant sa vie d’adulte était un disciple de la secte religieuse oomoto-kyo, a consacré de nombreuses années à l’étude et la pratique de kotodama, et au cours des années, il a formulé sa propre version de cette discipline qu’il a incorporée au système de l’Aïkido.
(Il devrait peut-être être précisé que, âgé de 7 ans, Ueshiba a été envoyé à Jizodera, un temple shingon dans la préfecture de Wakayama, ou il a étudié les écritures shingon (et également les classiques de Confucius), et il est probable que cette immersion dans la doctrine mikkyo shingon, à une période si formatrice de sa vie, ait influencé sa compréhension et évolution postérieures de l’art du kotodama.)
Brièvement :
Le cœur du système kotodama de Ueshiba repose sur l’intonation de la syllabe élémentaire SU.
SU représente le centre absolu du monde matériel – le noyau même de l’existence – le début de toutes choses. C’est l’essence de ce qui existait au moment précis de la création de l’univers.
Les autres syllabes primaires incluent :
YU – signifiant l’affirmatif : « oui », « c’est », « quelque chose »
MU – signifiant le négatif : « non », « ce n’est pas », « rien »
Et les sons des voyelles A-O-U-E-I
A – signifiant « monter » – est émis dans la gorge et la bouche
O – signifiant « descendre » – est émis prêt du cœur
U – signifiant « retourner à soi » – est émis profondément dans le hara
E – signifiant « s’étendre » – est émis d’une manière ou il est senti émaner de tout le corps
I – signifiant « la force de vie » – est émis d’une manière ou il vibre puissamment et émane/se projette à l’extérieur du corps
Le kotodama de « Usui »
(Note : les quelques détails donnés ici concernant la pratique du kotodama de « Usui » représentent tout ce que j’ai pu trouver jusqu’ici – sans m’inscrire au workshop de kotodama !).
Dans la pratique de kotodama, (et également dans la pratique de jumon,) la prononciation correcte des syllabes a une grande importance, et que se soit dans la pratique du kotodama de Ueshiba, ou dans la pratique dont on affirme aujourd’hui qu’elle était employé par Usui Sensei, le son des voyelles ont une prononciation identique :
- A – est prononcé « a »
- O – est prononcé « o »
- U – est prononcé « ou »
- E – est prononcé « è » (bien que certains le prononcent « èieu »)
- I – est prononcé « i »
Au-delà des sons de voyelles, les syllabes primaires suivantes sont apparemment utilisées dans la forme de kotodama de « Usui » :
- KU est prononcé « kou »
- KI est prononcé « ki »
- HO, KO, YO sont prononcé « ho », « ko », « yo »
- NE – « nè » (bien que certains le prononcent « nèieu »
- ZE – « zè » (bien que certains le prononcent « zèieu »
Il semble qu’on enseigne actuellement que Usui Sensei à utilisé principalement quatre kotodama comme alternatives vocales des quatre symboles reiki courants :
Kotodama : | Prononciation : | Symbole : |
ho ku ei | o kou è-i | cho ku rei |
ei ei ki | è-i è-i ki | sei heiki |
hi a ze ho ne | o a zè o nè | hon sha ze sho nen |
a-i ku yo | a-i kou yo o | dai ku my |
Vraisemblablement, la théorie est que l’on peut substituer ses kotodama aux symboles à travers le spectre complet de leur usage – c’est à dire, dans les « traitements » de reiki, le denju, le reiju et la méditation, etc.
Tandis que je ne connais pas pour l’instant l’approche qui était enseignée pour l’utilisation du kotodama de « Usui », ce qui suit est un exemple de format de pratique traditionnelle de kotodama.
Instructions générales pour la pratique du kotodama.
Essayez-vous dans la posture traditionnelle japonaise zazen (ou assis sur une chaise, avec le dos droit et le pieds à plat sur le sol) – avec vos mains, paumes vers la bas, reposants sur vos cuisses, ou dans la position gassho. Concentrez votre attention sur votre hara, au niveau de la zone connue sous le nom de seika tanden (5 cm sous le nombril).
Videz et calmez votre esprit.
Concentrez-vous sur l’instant présent – il n’y a QUE l’instant présent.
Respirez par le nez, sans à-coup, de façon constante, et sans forcer, alors vocalisez le kotodama tandis que vous expirez par votre bouche.
D’une voix résonnante, grave et profonde, psalmodiez chaque kotodama lentement, fortement – avec une concentration totale sur l’unité du corps, de l’esprit et de l’âme.
Prononcez chaque « mots-sons » distinctement, séparément – ne courrez pas ou ne les marmonnez pas ensemble. Laissez chaque « mot-son » emplir votre corps entier – vibrant à travers chaque molécule – chaque atome.
Soyez conscient de la résonance qui se propage dans toute votre aura, dans l’air autour de vous…