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Par Doreen Valiente. Extrait du livre : « An ABC of Witchcraft past and present ». Traduction & adaptation : Lune.
La danse fait partie des activités essentiellement magiques, à l’instar de la poésie et de la musique. Tous les peuples primitifs pratiquent des danses rituelles, non seulement pour le plaisir, mais aussi dans quelque but sous-jacent. Ils dansent pour la vie et également pour la mort ; comme le font encore les Irlandais lors des « veillées », afin d’offrir au défunt une fête d’adieux pour son voyage dans l’Autremonde.
Danser est très souvent de la magie imitative. Les sorcières dansaient sur des bâtons à chevaucher, en exécutant des sauts afin de favoriser la pousse des cultures. Le bâton à chevaucher placé entre les jambes était un symbole phallique, qui dispense fertilité et perpétue la vie. En 1596, les sorcières d’Aberdeen furent accusées de se réunir sur St. Katherine’s Hill et d’y pratiquer « une danse démoniaque, chevauchant des arbres, sur une longue distance ». Beaucoup plus tôt, en 1324, une sorcière irlandaise, Dame Alice Kyteler, fut accusée de posséder « un tube d’onguent avec lequel elle graissait un bâton, sur lequel elle déambulait et galopait en toute situation, quand et comme elle le voulait ». Ce type de danse contribua à la naissance de la légende selon laquelle les sorcières volaient dans les airs sur des bâtons ou des balais.
La ronde est un autre type de danse sorcière qui est exécutée autour d’une personne ou de quelque élément tel qu’un arbre ou un feu de joie. Le but de la ronde est de générer du pouvoir. Lorsqu’elle est pratiquée avec une personne au centre, probablement leader du coven, alors celle-ci dirige le « cône de pouvoir » qui a été levé. Les sorcières de l’âge de pierre représentées sur la peinture rupestre de Cogul renvoient à ce type de danse. Lorsque cette danse est exécutée autour d’un arbre, d’un feu de joie ou peut-être d’une ancienne pierre sacrée, ce peut être simplement dans un but de plaisir et d’extase, et ainsi pour invoquer et rendre un culte aux anciens Dieux. Les sorcières pensent que les dieux aiment voir les gens heureux et il s’agit donc d’une forme d’adoration satisfaisante.
Un troisième type de danse sorcière consiste à former une spirale, que l’on danse en se dirigeant vers le centre, puis vers l’extérieur. Elle symbolise la pénétration des mystères de l’Autremonde. Elle est parfois appelée « Ville de Troie », en référence à son motif labyrinthique, ressemblant supposément aux murs de Troie. La Grande-Bretagne possède un certain nombre de labyrinthes végétaux disséminés à travers toute sa campagne, la plupart de date indéterminée, mais certainement très ancienne. Ils sont reliés aux antiques mystères britanniques. Les anciens bardes nommaient « château en spirale » la demeure des héros défunts et le chaudron d’inspiration.
L’idée d’utiliser un labyrinthe pour représenter le passage dans un autre monde a été reprise par le christianisme et le motif en spirale peut parfois être trouvé dans les vieilles églises, avec le « paradis » ou « Sion » au centre.
La danse en cercle est tant associée à la sorcellerie que, dans le Sussex, les « cercles de fées », situés sur les hauts plateaux herbeux, sont appelés « hag-tracks », pistes de sorcière. Selon la croyance, elles seraient formées sous les pas de danse des sorcières. Considérés comme des cercles magiques naturels, les gens de la campagne les utilisent encore aujourd’hui pour diverses pratiques magiques privées, bien que cela se fasse de manière très discrète et secrète.
Les sorcières sont traditionnellement censées danser dos à dos. Il semble que cela ait été une sorte de gambade. Dans le livre A Pleasant Treatise of Witches (London, 1673), l’auteur dit :
La danse est étrange et magnifique, aussi bien que diabolique, car se plaçant dos à dos, elles se prennent l’une l’autre par les bras et se soulèvent mutuellement, puis secouent la tête d’avant en arrière, ce qui est semblable aux gambades, et se retournent comme si elles étaient folles.
Cela sonne comme une très juste description de certaines de nos danses modernes : le jive, le rock and roll, le twist, etc.
En fait, la danse des sorcières dont il parle était probablement beaucoup plus semblable à celle des jeunes d’aujourd’hui, libre et désinhibée. Les gens respectables de cette époque dansaient de façon très formelle et courtoise, et considéraient comme vulgaire et immoral tout autre style de danse.
Il se peut très bien que les sorcières soient à l’origine des danses modernes, car Reginald Scot, citant Bodin, dit ceci :
Les sorcières ont importé d’Italie vers la France des marches de nuit, ou plutôt des danses nocturnes, appelées « La Volta ».
On considère la Volta comme étant à l’origine de la valse, dont les rythmes excitants ont progressivement remplacé les anciens menuets et pavanes, et ouvert la voie aux danses plus pétulantes que nous connaissons aujourd’hui.
La danse a un effet magique très important sur les gens. Elle les réunit. Ils se mettent à l’unisson grâce au rythme de la danse. Un groupe de gens dansant ensemble en harmonie ne fait plus qu’un et cela est essentiel au travail magique. Leur humeur peut être excitée ou apaisée selon le rythme de la danse. En fait, un état de légère hypnose peut être induit par des formes magiques de danse ou les personnes peuvent atteindre un état d’extase, dont la forme originale du terme est « ex-stasis » et signifie « être à l’extérieur de soi ».
Cela signifie que le monde quotidien est mis de côté, avec ses misères et ses tracas, et que s’ouvrent les royaumes magiques. Les anciennes danses sorcières aidaient les gens à atteindre cette expérience. L’excitation et le plaisir des danses sauvages, de nuit en plein air, dans quelque ruine déserte ou rendez-vous secret constituaient l’un des principaux attraits de l’ancienne religion et c’est pourquoi il était si difficile pour l’église de l’éradiquer.
Cela apportait de la couleur et de l’amusement dans la vie des gens ordinaires, alors qu’ils n’avaient rien d’autre à espérer qu’une vie de dur labeur et de soumission. Nombre de ces cérémonies et usages ont imprégné les coutumes populaires qui sont restées vivantes et vigoureuses jusqu’à nos jours. Par exemple, parmi celles-ci se trouve la fameuse « Horn Dance », danse des cornes, d’Abbot’s Bromley dans le Staffordshire. En fait, un grand nombre de nos coutumes populaires, colorées et ancestrales, ont quelque chose du vieux culte de la nature et de l’art des sages en leur cœur.
La ronde est une imitation de la ronde des étoiles, du mouvement des corps célestes. Il s’agit donc d’une sorte d’imitation de l’univers. De la roue des saisons, de la vie elle-même, de la naissance, de la mort et de la renaissance. Danser, c’est intégrer les harmonies secrètes et subtiles de la nature, et ne faire qu’un avec les forces de la vie. C’est un peu tout cela que les sorcières ressentaient et ressentent toujours lorsqu’elles dansent. Une danse peut être une prière, une invocation, une extase ou un sortilège. Il s’agit de la magie de l’Ancien Monde et du monde entier.