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La Chasse aux Sorcières
Par Véro ©
Il y a peu je suis tombée sur un très long texte sur l’histoire du sort qui était fait aux sorcières. Plutôt que de le traduire mot à mot j’ai choisi de vous en faire un résumé.
La première crémation de sorcière a eut lieu en 1275 à Toulouse, donc bien avant la bulle papale d’Innocent VII (1484-1492) qui définissait les termes de la chasse aux sorcières. Pourtant avant ce texte les sorcières étaient reconnues et respectées, il arrivait que des notables louent leurs services, comme par exemple le comte de Kryburg qui en 1382 a embauché une sorcière afin qu’elle cause un orage pour mettre ses ennemis en déroute. L’église considérait alors que ces femmes agissaient avec l’autorisation de Dieu et que par conséquent il n’y avait rien à redire.
Mais avec l’autorisation papale et l’inquisition c’était la porte ouverte à tous les abus. Des millions de personnes ont été les victimes de ce mouvement : hommes, femmes, enfants, sans abris, indigents, mais aussi les personnes riches qui faisaient ombrage à d’autres. Ceux qui ne mourraient pas sous la torture finissaient au bûcher. Le sort des enfants était un peu moins pire : on les saignait dans un baquet (ça me rappelle une histoire de Saint Nicolas) ou on les décapitait dans leur cachot.
Il est remarquable que la chasse aux sorcières ait été particulièrement forte dans les pays germanophones, on estime que dans certaines villes allemandes il y eut 600 exécutions par an, soit deux par jour sauf les dimanches, et dans la région de Wertzberg le chiffre atteignit 900 en un an. Mais il n’empêche que les premiers cas sont recensés en France. Jeanne d’Arc a été condamnée avant la bulle papale (1431 pour ceux qui ne s’en souviendraient pas).
Dans les premiers siècles de notre ère l’église se concentrait essentiellement sur l’extermination des hérétiques, et des Manichéens. En 785 le synode de Paderborn stipulait que « quiconque affirmerait que les sorcières existent, que les croyances païennes existent, serait condamné à mort. » Le texte fut ratifié par Charlemagne. Mais la prolifération de sectes hérétiques fit que l’église changea d’avis. Entre 1000 et 1200 les Manichéens prirent de l’importance Dès 1179 il fut décidé d’œuvrer contre l’hérésie.
1184 marque la naissance officielle de l’inquisition. Cette année là le pape Lucius III déclare que chaque évêque devra visiter deux fois par an chacune des communes de son évêché afin d’y nommer des personnes susceptibles d’aider dans la chasse aux hérétiques et de mettre en place les procès y afférent. Dans certains pays tels l’Angleterre, l’Ecosse ou la Scandinavie, ce système de tribunaux locaux fonctionna sans avoir recours à l’inquisition jusqu’au 15ème siècle. En 1215 un concile décide de livrer les hérétiques à la justice séculière. Le texte fut ratifié par le concile de Toulouse en 1229, en 1231 l’inquisition passa sous la responsabilité papale. Ainsi les inquisiteurs (souvent des dominicains) remplacèrent les évêques. Les tribunaux cléricaux locaux furent annulés en 1235 sur l’initiative de Grégoire IX. En 1375 le pape Jean XXII autorisa que soient poursuivis tous ceux qui pratiquent la magie. Mais, une fois que les divers mouvements hérétiques du sud de la France eussent été réduits à néant l’inquisition eut besoin de nouvelles victimes pour remplir ses caisses. La chasse à la sorcière était donc bienvenue.
Elle s’autofinançait en quelque sorte. Les victimes payaient les frais de justice (veuillez excuser l’utilisation du mot « justice ») ainsi que la corde qui les attachait au pieu, qu’elles payaient également. Les tortures elles mêmes étaient payantes. Un prix avait été déterminé pour chacune d’elles. Il est à noter qu’avant que la torture n’entre en ligne de compte les crémations étaient beaucoup moins fréquentes. Les accusés pouvaient se défendre.
Au milieu du 15ème siècle la chasse aux sorcières se déplaça du sud de l’Allemagne vers le nord. Mais Jacob Sprenger et Henrich Kramer (Henricus Instituoris), deux inquisiteurs, rencontrèrent une certaine résistance parmi les comtes, les évêques et les autorités locales.
Kramer en vint à se plaindre au Pape. Innocent VIII, tout ouïe, édita le 5 décembre 1484 un bulle qui donnait plein pouvoir aux inquisiteurs. Le texte fut imprimé et largement diffusé. Il s’agissait du Malleus maleficarum (1487), en trois parties, 42 chapitres et une FAQ de 35 questions.
A ceux qui parlent de pratiques « moyenâgeuses » je rappellerais que le moyen âge a cessé en 1492 !
A présent les inquisiteurs avaient la part belle. S’il est vrai qu’il y eut essentiellement des victimes féminines, au fil du temps il fallut qu’ils se rabattent sur les hommes. Ils appréciaient aussi les enfants, car ces derniers avouaient bien plus vite ! Ainsi, à Reutlingen, un enfant de 12 ans dénonça 170 personnes (soit 170 nouvelles victimes pour ces messieurs).
Nous avons parlé plus haut de l’aspect pécuniaire de ce mouvement. Il faut ajouter que même les bourreaux ont profité de cette manne. Leurs épouses portaient des vêtements de prix et roulaient en carrosse.
Il fallut longtemps pour que la situation change, c’est avec le siècle des Lumières que l’humain devint capable de raisonner par lui même. Mais en Allemagne il fallut attendre le 18ème siècle. Parmi les réformes importantes des Lumières il y eut la reconnaissance de la liberté individuelle, et l’interdiction des tortures durant les procès.
Mais ce n’est qu’en 1965 que le concile Vatican II renonça officiellement à l’inquisition !
A Ellwangen en 1588, puis entre 1611 et 1618, 450 personnes furent exécutées comme sorcières, parmi elles 350 femmes. Cela représentait la moitié de la population féminine de la ville, et 1 homme sur 6.
Parmi eux Michael Dirr qui avait acquit le moulin du village après que le meunier précédent ait dû le vendre pour payer les frais du procès de sa femme. Lors d’une discussion avec le pasteur Berchtold, Dirr lui avait dit qu’il était convaincu de l’innocence de cette femme. Bien mal lui en prit car il fut enfermé à son tour. Pour éviter la torture il avoua tout ce qu’on voulait et 11 jours plus tard il fut brûlé. Ses frais de justice s’élevaient à 460 Gulden. Quant au pasteur, dans la mesure où il avait trop souvent tendance à penser à l’innocence des prisonniers, il vit sa propre sœur condamnée, afin qu’il comprenne où pouvait être son intérêt. Plus tard seuls les jésuites furent autorisés à rencontrer les prisonniers.
Personne n’était à l’abri dans cette ville. Les juges autorisèrent l’arrestation de 9 collègues du conseil municipal, 12 épouses de conseillers, 6 de leurs filles et 4 de leurs fils.
Le chanoine Georg Mair résista à 8 années de torture sans avouer quoi que ce fut. Il mourut en prison et fut enseveli sous la potence.
Le maire Hanns Blattner qui avait dû faire emprisonner tant de sorcières, dut assister à l’exécution de sa propre épouse en 1615.
Evidemment, la sage femme fut brûlée en 1588.
Le juge communal, dut démissionner en 1615 et quitter la ville avec toute sa famille, car une seule et unique sorcière (le boulanger du village) avait réussi à s’enfuir. On n’avait pas réussi à la rattraper.
Pourquoi tant d’exécutions dans cette seule ville, sous la prévôté de J.Ch von Westerstetten ? Sans doute espérait-il ainsi obtenir la reconnaissance de l’Eglise, et un rang élevé ? Peut-être se considérait-il comme un bon chrétien ? Sous son égide les représentants du tribunal n’étaient que des marionnettes. Il devint finalement évêque de Eichstätt.
Ce ne sera qu’en 1775, avec Anna Maria Schwägel, qu’on verra le dernier procès en sorcellerie officiel d’Allemagne. La Suisse, elle, devra attendre le 18 juin 1782, pour voir exécuter une ultime sorcière : Anna Göldin.