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Par Artus.
L’image que nous avons de la sorcellerie est issue de la culture populaire moderne. Mais quelle est sa réalité historique ? Je m’intéresse au sujet depuis pas mal d’années. Mais il existe une telle confusion qu’il n’est pas facile d’y voir clair. Je vais tout de même tenter de démêler un peu le sujet dans cet article.
La légende noire
Au XIXe siècle, le protestantisme a cherché à détruire le catholicisme par la propagande. Cela a d’ailleurs plutôt bien fonctionné. Tellement bien que l’athéisme a remplacé le catholicisme et que le protestantisme a finalement autant souffert que son ennemi. Mais ce n’est pas le sujet de l’article. Ce qu’il est important de savoir, c’est que pour arriver à ses fins, le protestantisme a créé, entre autres, une légende noire sur l’inquisition. Et une bonne partie de ce que nous croyons connaître de l’histoire de la sorcellerie est issue de cette légende noire. C’est pour cela qu’il règne autant de confusion sur le sujet.
L’inquisition
Du fait de la légende noire créée par certains protestants, la sorcellerie est souvent associée à l’inquisition. Pourtant, dans les faits, l’inquisition s’est assez peu intéressée à la sorcellerie. Elle considérait qu’il s’agissait d’une offense mineure. Une première inquisition a été créée au Moyen-âge pour combattre le catharisme. Elle a plus ou moins disparu en même temps que les cathares, pour renaître à la renaissance. Au départ, l’inquisition de la renaissance combattait principalement le judaïsme. Après la réforme, elle s’en est également prise au protestantisme.
Au XIXe siècle, les historiens favorables à la légende noire ont dénombré des millions de morts. Mais aujourd’hui, les historiens considèrent que l’inquisition était surtout un organisme de propagande. Malgré les dérapages de certains inquisiteurs, les condamnations à mort étaient plutôt rares. Pour donner quelques exemples, on estime aujourd’hui que l’inquisition médiévale a fait 3000 victimes et l’inquisition espagnole en a fait 2000. Même si cela reste abominable de condamner des gens à mort pour « hérésie », la vision historique actuelle de l’inquisition est beaucoup moins sinistre que dans l’imaginaire populaire. Et selon les époques, l’inquisition s’est surtout intéressée aux cathares, aux juifs et aux protestants. D’ailleurs, le sabbat des sorcières est une diabolisation du shabbat des juifs (sabbat et shabbat sont en fait des translittérations différentes du mot שבת).
La chasse aux sorcières
Contrairement à la légende, la chasse aux sorcières n’est pas organisée par l’Église. Elle était surtout une affaire de tribunaux laïques et de « justice » populaire. La noblesse souhaitait montrer qu’elle était plus chrétienne que le clergé. Et l’idiotie populaire a engendré de nombreux lynchages. La chasse aux sorcières a été beaucoup plus meurtrière que l’inquisition. Aujourd’hui, on estime généralement qu’elle a fait 60 000 victimes.
On peut se demander qui étaient vraiment ces victimes. On a d’abord pensé qu’il s’agissait d’un véritable culte organisé. Mais aujourd’hui, les historiens soutiennent généralement l’idée que la sorcellerie était un ennemi imaginaire. Ils considèrent en effet que sous la torture, les accusés ont fini par avouer les suggestions de leurs accusateurs. Selon cette hypothèse, les procès de sorcellerie ne témoignent que du fantasme des accusateurs. Il est fédérateur de posséder un ennemi commun. Et la chasse aux sorcières a probablement été utilisée comme un outil politique pour fédérer le peuple.
Le malleus maleficarum
Dans l’imaginaire populaire, le malleus maleficarum était le manuel de l’inquisiteur pour combattre la sorcellerie. Mais les faits sont très différents. Même si la sorcellerie était considérée comme une offense mineure par l’inquisition, elle a passionné certains de ses membres. C’est par exemple le cas d’Heinrich Kramer. Mais loin de l’encourager, sa hiérarchie trouvait qu’il était trop zélé dans l’affaire de sorcellerie concernant Helena Scheuberin. Ses supérieurs lui ont donc ordonné d’arrêter son enquête et l’ont forcé à quitter son diocèse. Au passage, Scheuberin a été libérée et condamnée à réciter quelques prières. Kramer avait surtout l’air obnubilé par la sexualité de la prétendue sorcière. Mécontent de la décision de sa hiérarchie, Kramer a réclamé une bulle pontificale et écrit le malleus maleficarum. Ce livre a été rejeté par l’inquisition. Celle-ci a mis en avant le manque d’éthique de ce livre, l’illégalité des procédures proposées et son incohérence par rapport à la doctrine catholique concernant la démonologie. Le malleus maleficarum a été interdit en 1490, trois ans après sa première publication.
En conclusion
Encore aujourd’hui, de nombreux écrits wiccans restent fidèles à la légende noire inventée par certains protestants. C’est encore pire outre-Atlantique avec de nombreux auteurs qui n’hésitent pas à raconter la tragédie des millions de sorcières et de sorciers, morts sur les bûchers. Mais lorsqu’on se détache de cette légende, on se rend compte que l’imagerie populaire de la sorcellerie qui a inspiré la wicca est une création récente.
J’ai écrit cet article parce que dans leur méconnaissance de l’histoire, de nombreux wiccans ont fait comme les instigateurs de la chasse aux sorcières. Ils se sont créé un ennemi imaginaire. Avoir un ennemi commun est peut-être fédérateur, mais ce n’est pas très bon pour notre santé mentale.
Pour aller plus loin
Le sujet est vaste et cet article est succinct. Si vous souhaitez aller plus loin, voici quelques articles Wikipédia qui pourront vous servir de base :
En français :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Inquisition
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chasse_aux_sorci%C3%A8res
Cet article est un peu confus. Par exemple, il met en avant des bulles pontificales qui n’ont pas vraiment eu d’impact, pour ensuite affirmer que selon la vision moderne, la chasse aux sorcières est le fruit de la christianisation excessive du pouvoir temporel.
En anglais :