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Par Doreen Valiente. Extrait du livre : « An ABC of Witchcraft past and present ». Traduction & adaptation : Lune.
Une malédiction peut-elle véritablement agir ? Selon l’expérience séculaire et mondiale, la réponse à cette question est : si la malédiction est méritée, elle peut agir et elle agit.
Cela semblerait classer les malédictions dans le domaine de la magie noire ; mais ce n’est pas nécessairement le cas. Certains documents montrent que la malédiction produisant l’effet le plus meurtrier est celle qui fait appel aux puissances du destin et de la justice, afin de venger un tort que les lois humaines ne peuvent ou ne veulent réparer.
On pourrait arguer que la peur superstitieuse et une mauvaise conscience, de la part de la personne qui a été maudite, expliquent le fonctionnement apparent de la malédiction. Cela peut, en effet, expliquer la manifestation de certaines malédictions célèbres ; mais pas de toutes. Par exemple, cela n’explique pas la malédiction de Tichborne, qui fut jetée sur une famille de l’aristocratie anglaise, sous le règne d’Henry II, et qui se réalisa dans ses moindres détails, des siècles plus tard.
Lady Mabell de Tichborne, l’auteur de cette malédiction, était une femme pieuse et de caractère qui souhaitait effectuer un don annuel, ou « l’aumône », aux pauvres. Connaissant la mesquinerie de son époux, elle lui dit sur son lit de mort que si jamais lui ou ses descendants cessaient cette charité, un grand malheur s’abattrait sur la famille, leur nom serait changé et leur race s’éteindrait. L’imminence de leur déchéance se manifesterait par la naissance d’une génération de sept fils, à la suivante, de sept filles, et alors la famille serait détruite.
Pendant des siècles, la « Tichborne Dole » (ndlt : dole = aumône), sous forme de distribution annuelle et gratuite de pain, fut concédée aux pauvres. Puis en 1796, le septième baronnet, Sir Henry Tichborne, décida que l’événement était devenu une nuisance et y mit un terme.
En 1803, une grande partie de l’ancien manoir s’effondra. Les sept fils, suivis par sept filles, naquirent comme prévu ; puis une série de malheurs, notamment la célèbre affaire du requérant Tichborne, convainquirent les descendants de Lady Mabell de la réalité de leur malédiction ancestrale. La famille, dont le nom changea pour Doughty-Tichbourne du fait des successions, décida que l’aumône devrait être restaurée. Elle est distribuée chaque année depuis ce jour, bien que la farine remplace désormais le pain.
La « ruine des Seaforth » est une autre malédiction célèbre qui a traversé les siècles. C’est un exemple de ces malédictions qui prennent la forme d’une prophétie funeste. L’Écosse semble en être le foyer particulier, probablement en raison de sa longue tradition de double vue. La « ruine des Seaforth » fut prononcée par Kenneth Odhar, connu sous le nom du Voyant de Brahan. Il fut condamné à mort pour sorcellerie par la Comtesse de Seaforth, et brûlé publiquement sur le bûcher à la fin du XVIIe siècle. Alors qu’il était en route pour son exécution, il prononça solennellement ces paroles :
Je vois un chef, le dernier de sa maison, à la fois sourd et muet. Il sera le père de quatre beaux garçons, qui tous le précéderont au tombeau. Il vivra accablé de soucis et mourra endeuillé, conscient que l’honneur de sa maison est anéanti à jamais et que nul autre chef des Mackenzie ne régnerait sur Kintail.
Le voyant décrivit ensuite en détail quels malheurs s’abattraient sur la famille ; et il déclara que lorsque les quatre grands lairds naîtraient :
Le premier aura des dents de lapin, le second un bec-de-lièvre, le troisième sera simplet et le quatrième, bègue.
Le Seaforth alors détenteur du titre serait le dernier de sa lignée. Cette prophétie, faite publiquement sous une forme si dramatique, demeura longtemps dans les mémoires ; et en 1815, la lignée des Seaforth s’éteignit, dans les circonstances exactes décrites par le Voyant de Brahan.
Les deux histoires ci-dessus sont basées sur des faits historiques. Un certain nombre de récits similaires pourraient y être adjoints issus des archives de vieilles familles écossaises et anglaises.
En 1926, le révérend Charles Kent, recteur de Merton dans le Norfolk, révéla qu’il avait tenu un service religieux public dans une tentative de lever la célèbre « Malédiction de Sturston », un village du Norfolk qui fut maudit à l’époque de la Reine Elizabeth. Il utilisa l’autel d’un ancien tombeau dans le cimetière en ruines comme pupitre pour lire le service religieux ; et les gens se rassemblèrent des kilomètres à la ronde. Il croyait que son action avait finalement brisé cette malédiction ; mais les événements qui s’ensuivirent lui prouvèrent qu’il se trompait.
La malédiction avait été jetée sur le Seigneur du manoir de Sturston, un certain Sir Miles Yare, par une vieille femme qui avait la réputation d’être une sorcière. La raison exacte pour laquelle elle aurait maudit son propriétaire n’est pas claire ; mais elle jeta une malédiction sur ses terres, sa maison et sa personne, puis déclara que l’endroit tomberait en ruine, jusqu’à ce que plus une pierre ne tienne sur une autre. Le lieu se dégrada effectivement. L’ancien manoir devint une ferme, qui elle-même fut désertée, puis tomba en ruines que l’on croit hantées.
Le recteur avait été invité à lever la malédiction, à cause de la longue histoire de malchance et de déclin du canton. Pour une fois, les choses semblaient plus lumineuses après son service religieux ; mais à l’approche de la Seconde Guerre mondiale, l’endroit fut réquisitionné pour l’entraînement militaire. Les habitants s’en allèrent et aujourd’hui Sturston est un endroit perdu et désolé, dont les bâtiments sont en ruines. La malédiction est quasiment réalisée.
Une autre histoire de malédiction de sorcière est reliée au comté de Breadalbane. Pendant de nombreuses années, on a montré aux visiteurs de l’ancien château de Killin, sur le Loch Tay, l’endroit où une sorcière fut mise à mort sur ordre du comte de Breadalbane de l’époque. On leur racontait comment la sorcière maudit la famille de Breadalbane et prophétisa que le comté ne serait pas transmis directement de père en fils pendant sept générations. Ce qui s’avéra précisément juste, comme le remarque une lettre publiée dans le journal du Times, datant du 18 mai 1923, sous le titre “A Witch Story” (une histoire de sorcière). Le correspondant déclarait qu’il avait entendu parler de la malédiction alors qu’elle persistait depuis cinq générations ; l’avis de décès du comte de Breadalbane venait de paraître dans le Times et il remarquait qu’il s’agissait de la septième génération et que le titre passait à un cousin éloigné.
Comment pouvons-nous expliquer cela ? Y a-t-il quelque puissance dans l’invisible qui écoute les paroles des opprimés. Ou bien les personnes sur le point de mourir découvrent-elles en elles-mêmes la faculté de prophétie et devinent la ruine de leurs oppresseurs ?
Ces éventualités pourraient expliquer les malédictions ci-dessus, mais difficilement l’incroyable histoire du diamant Hope. Un joyau qui laisse dans son sillage, au fil des ans, un cortège de catastrophes trop long à détailler ici et qui semble au-delà de toute coïncidence. La pierre apparut tout d’abord en Europe à l’époque du roi Louis XIV. Elle fut ramenée à la cour de France par un homme appelé Tavernier, qui l’avait volée sur une statue d’un temple de Mandalay. Le diamant est d’une magnifique couleur bleu violet et son poids actuel, après avoir été retaillé, est de 44 1/4 carats. Aujourd’hui, elle est exposée à la Smithsonian Institution, Washington, où peut-être l’atmosphère scientifique et le fait que personne ne la porte réellement ni ne tente d’en tirer de l’argent, permettent de garder en veilleuse quelque étrange et terrifiant pouvoir conféré par sa maudite histoire. Toutefois, la seule façon de lever enfin la malédiction du diamant Hope pourrait être de le rendre au temple auquel il a été volé.
Pour finir, voici l’histoire d’une malédiction qui pourrait avoir été induite par autosuggestion, mais qui s’est révélée tout aussi efficace. En avril 1795, un officier de la marine, le capitaine Anthony Molloy du H.M.S. Caesar, fut reconnu coupable par une cour martiale de lâcheté face à l’ennemi, en rapport avec sa conduite lors de la bataille du 1er juin 1794. Cependant, la cour conclut que la conduite de Molloy lui était parfaitement inhabituelle, par conséquent elle ne lui imposait pas de sentence de mort, mais ordonnait son renvoi du navire.
Robert Chambers, dans son Book of Days, nous dit :
On raconte une très curieuse histoire pour expliquer cet exemple de “peur des braves”. On dit que Molloy s’était comporté de manière déshonorante envers une jeune femme à laquelle il était fiancé. Les amis de la dame souhaitaient porter en justice cette rupture de fiançailles contre ce capitaine inconstant, mais la jeune femme s’y refusa, déclarant que Dieu le punirait. Quelque temps plus tard, ils se rencontrèrent accidentellement dans un lieu public à Bath. Elle le mit fermement face à ses responsabilités, tandis que lui, se dérobant, marmonna quelques excuses incohérentes. La dame lui dit :
“Capitaine Molloy, vous êtes un mauvais homme. Je vous souhaite la plus grande des malédictions qui puissent s’abattre sur un officier britannique. Lorsque le jour de la bataille viendra puisse votre cœur déloyal vous faire défaut !”
Sa conduite ultérieure et son irrémédiable déshonneur menèrent à l’accomplissement de son souhait.